Essassa : le camp de police qui transforme les agents en propriétaires

Au sud-est de Ntoum, sur les plateaux rouges d’Essassa, s’étend un chantier de dix hectares qui illustre la volonté du président Brice Clotaire Oligui Nguema de moderniser la sécurité publique durant son septennat. À première vue, le camp de police pourrait sembler modeste face aux mégaprojets routiers ou énergétiques en cours, mais sa portée sociale et son modèle patrimonial en font une pièce maîtresse du puzzle de développement national.

Trente-et-un immeubles R+1 entièrement équipés accueilleront bientôt les forces de l’ordre et leurs familles : neuf bâtiments de deux chambres et vingt-deux de trois, chacun doté de douches et WC privatifs, d’un salon baigné de lumière, d’une cuisine fonctionnelle et d’une terrasse ouverte sur la plaine de Ntoum. L’architecture, inspirée du logement résidentiel de standing, marque une rupture nette avec les casernes traditionnelles.

Le caractère réellement novateur du projet réside dans la cession future de propriété : dès que l’agent aura acquitté des frais fixés à un niveau volontairement abordable, le logement lui sera transféré à titre définitif. Ce dispositif transforme le logement de fonction en levier d’ascension sociale et fidélise durablement les effectifs – un avantage stratégique pour l’État, qui mise sur la stabilité du corps policier.

Autour des habitations, l’aménageur déploie un écosystème complet : centre de santé, galerie marchande, terrain de football, plateau multisport et aires de jeux pour enfants. Ce schéma “quartier intégré” vise un double objectif : soulager les familles du temps perdu en déplacements et renforcer la cohésion professionnelle par la convivialité quotidienne.

Certes, le Gabon voit fleurir des chantiers plus spectaculaires – port en eau profonde, centrales énergétiques, axes routiers structurants. Pourtant, le camp d’Essassa occupe une place singulière : il inscrit concrètement la réforme institutionnelle dans la vie de tous les jours. En multipliant les inspections inopinées, la Coordination de suivi des travaux et la hiérarchie policière rappellent à l’entreprise adjudicataire que ce projet-pilote doit être à la hauteur des attentes : rapidité d’exécution, qualité durable, exemplarité architecturale.

Lorsque les premiers titres fonciers passeront des mains de l’État à celles des policiers, la promesse trouvera sa traduction la plus visible : un badge et une clé, symboles d’un service public qui protège et qui élève. Essassa n’a peut-être pas les dimensions d’une route transgabonaise, mais il incarne avec force une idée essentielle : le progrès se mesure aussi à la dignité offerte à ceux qui veillent, chaque jour, sur la sécurité de tous.